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RYAN WILDE
Reflets dans la galerie des glaces
April 23 - May 28, 2022

In Ryan Wilde's "Reflets dans la galerie des glaces", we meet a whole feminine and whimsical group of characters: a “Lapine” confident of her charms, a Madame de Pompadour dressed for battle, the Three Grace flirting... Marie Antoinette is not far away and we imagine her being the head of this charming parade.

 

As Ryan Wilde explains, she wanted to stage "the American interpretation of French beauty, all in excess and humor." The tone is casual, without pretention. Voluntarily girly and even silly. Just like the colors — from yellow to pink — or the wallpaper patterns. In these “mise-en-scene” of a masquerade, visions of innocence go along with coquetry. The cute costumes suddenly become protection. As for the parts of the woman's body, they appear fragmented, enlarged or inverted. The mouth takes the place of the nipples, the breasts curl up in the palms of the hands. Only the eyes are absent, as if they were the only ones that the artist did not want to give us.

 

Behind what seems to be a series of childish games, Ryan Wilde reveals her inspiration. Found in her readings of feminist writings. Such as the iconic essay by the English psychoanalyst Joan Rivière, Womanliness as a masquerade, published in 1929, which overthrows the usual attributes of femininity — from colors to funny faces, from sweetness to a supposed innocence — to turn them into shields and weapons, against men’s self-proclaimed violent nature.

 

And the most famous room in the Palace of Versailles is not a simple decor for the artist, but again a reference from another reading. Simone de Beauvoir's Second Sex. In response to Lacan’s "mirror stage” where a man manifests self in front of his own image, Simone de Beauvoir defends, for the woman, the learning and the construction of herself by looking at the image of others, allies of the same sex...

 

Ryan Wilde shares a multitude of feminine visions. Women of power — political or sexual — capable of creating an image for themselves and then suddenly changing it. Proving that by manipulating their own attributes, they can manipulate society. And disrupt it.

 

La Lapine frees herself from the Playboy Playmate — a magazine for which Ryan Wilde's father worked for twenty years as an illustrator and for which the artist feels a kind of love-hate relationship: hate for this temple of female imagery modeled and normalized by the male gaze, love for the possible reversals made in Playboy to the point where Wilde even drew the rabbit ears worn by Kate Moss on the cover.

 

Madame Boobhead becomes the ideal mother of conservative America. The pony-tailed Coquinette carries guilty desires within her. The Three Graces change innocent mythology into Sapphic frolic.

 

So much so that we can imagine Ryan Wilde, in her Galerie des Glaces, ending up multiplying into all these versions of herself, into all these reflections. Avatars and sisters protecting her deep intimacy and questioning femininity. Never unique, nor monolithic.

 

After studying in art school, Ryan Wilde was a hat designer for twenty years. And now she returns to the primordial gestures of her creation: painting and sculpting. Even if the sewing and the wooden hat molds are the same ones she now uses for her sculptures. Reminding us that the garment is the ideal tool to change skin very quickly. And, by making the costume an art, to disrupt our opinion.

Boris Bergmann

© Courtesy of Ryan Wilde and Galerie Julien Cadet

© Credits photo: Thomas Marroni

Dans les « Reflets dans la galerie des Glaces » de Ryan Wilde, on croise toute une équipée féminine et fantasque : une Lapine sûre de ses charmes, une Madame de Pompadour habillée pour le combat, les Trois Grâces en plein flirt… Marie Antoinette n’est pas loin et on l’imagine prenant la tête de ce charmant défilé.
 

Comme l’explique Ryan Wilde, elle a voulu mettre en scène « l’interprétation américaine de la beauté française, tout en excès et en humour. » Le ton est désinvolte et sans prétention. Volontairement « girly » voire « silly ». Tout comme les couleurs — du jaune criard au rose petite fille — ou les motifs de papier peint. Dans ces mises en scènes de mascarade, les visions d’innocence côtoient la douce coquetterie. Les costumes de « cuteness » s’allient aux apparences et deviennent des protections. Quant aux parties du corps de la femme, ils apparaissent morcelés, grandis ou inversés. La bouche prend la place des tétons, les seins se lovent dans les paumes des mains. Seuls les yeux s’effacent, comme s’ils étaient les seuls que l’artiste ne voulait pas nous livrer.
 

Car derrière ce qui semble n’être qu’une série de jeux d’enfants, Ryan Wilde laisse apparaître ses inspirations. Et, peut-être, ses revendications. En premier lieu, ses lectures d’écrits féministes. Tel l’essai iconique de la psychanalyste anglaise Joan Rivière, Womanliness as a masquerade, publié en 1929, qui renverse justement les attributs habituels de la féminité — des couleurs aux mimiques, de la douceur à la prétendue innocence — pour les changer en boucliers, puis en armes, contre la violence affichée du masculin.
 

Tout comme la plus célèbre pièce du château de Versailles n’est pas un simple décor pour l’artiste, mais là encore une référence de lectrice. Au Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir. En réponse à Lacan et à son « stade du miroir » où l’homme se construit face à sa propre image, Simone de Beauvoir défend, pour la femmes, l’apprentissage de soi par l’image des autres, alliées du même sexe…
 

Ryan Wilde ouvre donc notre regard vers une multitude de visions féminines. Femmes de pouvoir — politique ou sexuel. Capables de se fabriquer une image et d’en changer brusquement, prouvant ainsi qu’en manipulant son individualité, on peut donc manipuler la société. Et ainsi, la bouleverser.
 

La Lapine s’affranchit de la Playmate de Playboy — magazine pour lequel le père de Ryan Wilde a travaillé vingt ans comme illustrateur et pour lequel l’artiste éprouve une sorte de relation d’amour-haine : haine face à ce temple de l’imagerie féminine modelée et normée par le regard des hommes, amour pour les retournements possibles à tel point qu’elle a même un jour dessiné les oreilles de lapin portées par Kate Moss en
couverture.

 

Madame Boobhead devient la mère idéale de l’Amérique conservatrice. La Coquinette à queue de cheval porte en elle d’inavouables désirs. Les Trois Grâces passent d’un innocent batifolage à des pulsions
saphiques.

 

À tel point qu’on imagine Ryan Wilde, en sa galerie des Glaces, finir par se multiplier en toutes ces versions d’elle-même comme autant de reflets. Avatars et soeurs protégeant son intimité profonde pour mieux questionner toutes la féminité. Jamais unique, ni monolithique.
 

Après des études en école d’art, Ryan Wilde fût chapelière pendant vingt ans. Avant de revenir aux gestes premiers de sa création : peinture et sculpture. Même si les réflexes de couture et les moules en bois qu’elles utilisaient pour ses chapeaux sont désormais ceux qu’elle applique pour ses sculptures. Nous rappelant ainsi que le vêtement est l’outil idéal pour changer très vite de peau. Et, en faisant du costume un art, pour mieux
bouleverser notre regard.

Boris Bergmann

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